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À marche forcée, les entreprises doivent aujourd’hui s’adapter aux disruptions organisationnelles, technologiques et culturelles ..et leurs Direction des Ressources Humaines en anticiper les impacts en termes de compétences et de métiers. La Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences (GPEC) a longtemps été l’outil privilégié des DRH pour répondre à ces enjeux et planifier les actions qui en découlaient. Cependant, force est de constater que la GPEC montre aujourd’hui des limites, peinant à s’adapter à la rapidité et et à la profondeur des transformations à l’œuvre dans le monde du travail.

C’est dans ce contexte que la Gestion des Emplois et Parcours Professionnels (GEPP) a émergé comme une réponse plus adaptée. Mais en quoi la GEPP se distingue-t-elle concrètement de la GPEC ? Quels sont les avantages spécifiques de cette nouvelle approche pour les parties prenantes impliquées (employeur, collaborateurs, partenaires sociaux) ? Et surtout, comment s’y prendre pour mettre en place une démarche GEPP efficace ?

Qu’est-ce que la GEPP et en quoi se différencie-t-elle de la GPEC ?

Encadrée par différentes lois (2005, 2015), la GPEC est une approche qui vise à adapter les emplois, les effectifs et les compétences aux exigences de la stratégie de l’entreprise et aux modifications de son environnement économique, technologique, social et juridique. Elle s’attache donc à planifier des actions de développement ou de transformation des emplois et des compétences sur la base de prévisions à moyen / long terme. Dans un environnement où l’agilité et la capacité à réagir en temps réel sont devenues déterminantes, on identifie déjà une première limite. Ensuite, la GPEC part des besoins macros de l’entreprise mais peine à faire le lien avec les projets et aspirations individuelles des collaborateurs qui sont souvent insuffisamment associés à une démarche qui s’avère être essentiellement descendante.

C’est afin de prendre en compte ces axes de progrès importants que le concept de Gestion des Emplois et Parcours Professionnels (GEPP) a émergé en 2017 dans le cadre des ordonnances Macron. Se voulant une démarche englobante, agile et à la fois top-down et bottom-up, elle vise à aligner stratégiquement les besoins de l’entreprise avec les aspirations professionnelles des salariés, tout en assurant leur développement continu au travers de la notion de parcours professionnel. Ce parcours doit permettre au collaborateur de sécuriser son employabilité grâce à des actions qui intègrent notamment formation continue et mobilité interne.

Quels sont les principaux avantages de la GEPP ?

  • Pour les employeurs, la GEPP est clairement un levier de compétitivité. Elle permet de mieux cartographier les compétences disponibles, d’anticiper les besoins futurs et de développer des stratégies pour combler les écarts au niveau de son capital humain. Plus flexible et agile que sa devancière la GPEC, la GEPP doit aussi permettre une meilleure allocation des budgets de développement des compétences (formation, coaching..), réduire le turnover et en limiter les impacts. Elle doit également permettre le développement de la performance et de la productivité par une QVCT (Qualité de Vie et des Conditions de Travail) meilleure. Enfin, puisqu’elle répond aux exigences légales de négociation sur la gestion des emplois et des compétences, la GEPP préserve l’entreprise des risques juridiques et des pénalités potentielles.
  • Pour les collaborateurs, la GEPP offre des perspectives d’évolution et de sécurisation de leur parcours professionnel, en leur permettant de demeurer employables et compétitifs sur le marché du travail. Au plan de l’épanouissement au travail, la GEPP permet une meilleure reconnaissance et valorisation des talents individuels et donne au collaborateur une certaine visibilité sur ses perspectives de carrière. À un moment où la disruption technologique que représente l’IA (Intelligence Artificielle) interroge et inquiète certains, une démarche proactive telle que la GEPP doit aussi donner l’opportunité aux collaborateurs de s’impliquer dans la transformation de leur emploi, de se former et, in fine, de rester pertinents.
  • Pour les partenaires sociaux, la GEPP participe d’un renforcement du dialogue social, structuré autour de négociations régulières (normalement triennales) avec la direction. Même si il n’y pas d’obligation d’aboutir à un accord, du fait de ces négociations, les partenaires sociaux disposent d’une meilleure visibilité sur les directions stratégiques de l’entreprise, ils sont en mesure d’influer plus efficacement la gestion des emplois et des compétences et de s’assurer que les intérêts collectifs des collaborateurs ainsi que leur employabilité individuelle soient bien pris en compte. Également, promouvant une équité de traitement quel que soit le type de contrat ou de statut du collaborateur, la GEPP va dans le sens d’une gestion plus transparente du capital humain, de l’amélioration de la QVCT et d’une réduction des RPS (Risques Psychosociaux).

Comment s’y prendre pour mettre en place une démarche GEPP efficace ?

La GEPP est un processus qui requiert une approche structurée et une série d’actions ciblées. Pour les DRH, l’implémentation de la GEPP s’articule autour de trois étapes clés :

  1. Réalisation d’un bilan des ressources internes : Cette étape initiale consiste à dresser un état des lieux exhaustif des ressources humaines, financières, techniques et compétences présentes au sein de l’organisation ainsi que des attentes des collaborateurs. Cela implique l’analyse des entretiens annuels, de la répartition démographique des effectifs via la pyramide des âges, ainsi que la cartographie des compétences et métiers à travers un référentiel précis. Ce bilan doit être partagé avec les représentants des salariés afin d’assurer une information et un alignement autour du diagnostic de départ.
  2. Identification des besoins et des évolutions : Il s’agit ici de prévoir les différents scenarii de transformation du marché et d’évaluer comment ceux-ci, compte tenu de la stratégie globale de l’organisation, pourront l’impacter ainsi que son capital humain. Cela nécessite de comparer les données actuelles issues du bilan avec les projections pour déterminer les besoins en compétences et en effectifs et formuler les plans de transformation adéquats. Ce travail s’effectue typiquement dans le cadre d’une approche descendante et montante à la fois, associant  les opérationnels qui apportent leur connaissance du terrain mais aussi les partenaires sociaux qui doivent connaitre et s’approprier les hypothèses de travail.
  3. Définition et mise en œuvre du plan d’action : Sur la base des livrables issus des étapes précédentes, la Direction des Ressources Humaines élabore et exécute un plan d’action holistique intégrant l’ensemble des outils de transformation des ressources humaines et notamment : programmes de formation, de coaching et de mentorat, actions de VAE, stratégie de recrutement et de marque employeur, programmes d’onboarding, stratégie de gestion et de rétention des talents, politique de mobilité interne..etc. Naturellement, tout ceci se déploie en concertation avec les partenaires sociaux et de manière à être en conformité avec les obligations légales, telles que les accords de branche et les conventions collectives.

Quels facteurs clés de succès ?

La mise en œuvre d’une démarche GEPP est un investissement à moyen et long terme, nécessitant généralement entre 12 à 18 mois avant une implémentation complète, ce délai variant selon la taille et la complexité de l’organisation. Le maître d’œuvre de cette démarche doit être un acteur clairement identifié au sein de la Direction des Ressources Humaines et de préférence, le DRH lui-même, soutenu par la Direction générale et l’ensemble du CODIR afin de garantir la légitimité et les ressources/efforts nécessaires à l’initiative.

Pour insuffler une dynamique à la GEPP (qui, au départ, pourra paraître aux collaborateurs une initiative peu « palpable »), il est important de l’intégrer dans les processus managériaux réguliers (revue annuelle, entretiens professionnels..) et de la faire vivre à travers de formations, ateliers et mises à jour régulières.

Au plan de la communication interne, celle-ci doit naturellement être aussi transparente et régulière que possible et adopter une approche multicanale (intranets d’entreprise, newsletters, événements internes..etc) afin de s’assurer que chaque collaborateur en est informé, se sent impliqué et se projète dans la démarche.

Évidemment, garantir une GEPP robuste et efficace peut nécessiter de se faire accompagner par des experts des ressources humaines, du droit social ou de la communication interne pendant tout ou partie des phases initiales de la démarche. Le jeu en vaut certainement la chandelle compte tenu du niveau de complexité croissant auquel les entreprises font face aujourd’hui et vont devoir faire face dans l’avenir.

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